Litteratura

Accueil > Shruti - Smriti > Carlo Suarès : HA-QABALA

La Bible restituée

Carlo Suarès : HA-QABALA

Carlo Suarès

mercredi 24 novembre 2010

Extraits de Carlo Suarès, La Bible restituée

Revenons à Abram, devenu Abraham. Il légua le document cabalistique à son fils Yitzhhâq (Isaac), lequel le légua à Yaâqov (Jacob). Ce dernier, déçu par la plupart de ses fils, désigna comme héritier de cette connaissance son onzième fils, Yôssef (Joseph), en l’envoyant vers un guet-apens que ses frères avaient machiné dans l’intention de le tuer.

L’attentat contre Joseph était du plus pur style YHWH, instauré depuis le malencontreux accident survenu à Abel, au début du mythe. Je dois, en effet, tout de suite signaler que, contrairement à l’interprétation si connue, Caïn n’a pas assassiné Abel. Caïn - le texte le dit lorsqu’on sait le lire - était l’incarnation de son père (symbolique) YHWH, tandis qu’Abel n’était que le « fils de la femme ». Et il avait suffi que YHWH, incarné en Caïn, l’intemporel, le non-conditionné, l’indéterminé en acte, il avait suffi qu’il se dressât devant Abel pour que celui-ci disparût, néantisé.

Il était pourtant irréprochable, comme tous ceux que leur temps, leur milieu, leur fonction, conditionne et détermine, mais de ce fait il ne pouvait ni hériter, ni transmettre le germe en voie de devenir humain et il avait fallu le remplacer.

Instruit par cet événement, YHWH, prudemment, soumit par la suite le germe de l’humain à un test rigoureux : il tenterait de tuer l’homme qu’il aurait préparé en vue d’être ce porteur de liberté inconditionnée.

Par le truchement de l’initié Abraham, il tenta de tuer Isaac.

Il se jeta sur Jacob au moment où celui-ci était le plus désemparé et, ne pouvant le tuer en un combat qui dura toute une nuit, le bénit.

Il ordonna à Moïse de demander à Pharaon la libération du peuple en ajoutant qu’il endurcirait le cour de Pharaon pour que celui-ci refuse (Ex. x, 1, 27) et cela n’étant pas suffisant, il calma les appréhensions de Moïse en le rassurant : « Va, lui dit-il, car tous ceux qui en voulaient à ta vie sont morts » et « pendant le voyage, en un lieu où Moïse passa la nuit, YHWH l’attaqua et voulut le faire mourir » (Ex. iv, 19, 24).

Nous voyons dans ce passage (et dans les passages qui suivent) des exemples du « processus de personnalisation » qui se produit inévitablement lorsqu’on lit ces textes sans connaître le code chiffré de leurs symboles. Il est pourtant évident que selon ce mode de penser la vocation cosmique de l’homme - Adâm - est de permettre aux deux vies de sa vie double de se féconder mutuellement. Devenant ainsi un être nouveau, l’actualisation de l’immanence YHWH pourra se produire en lui.

Et c’est d’une telle actualisation, avec les transformations qui s,ensuivent, que les cabalistes nous entretiennent lorsqu’ils semblent faire parler et agir « l’immanence YHWH », dont les actes et les paroles se situent, pour eux, sur un plan purement symbolique. De surcroît, tous les êtres dont il est question dans ces récits (Caïn, Abel, Jacob, Moïse) sont des archétypes mythiques et ne doivent en aucun cas être confondus avec des personnages historiques.