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La Bible restituée
Carlo Suarès : HA-QABALA
Carlo Suarès
mercredi 24 novembre 2010
Extraits de Carlo Suarès, La Bible restituée
Abram possédait la Qâbala en tant que connaissance et en tant qu’écriture.
Le document où était inscrit le code chiffré de cette connaissance-là (il y en a d’autres) - provenait du mythique mont Ararath où l’arche s’était, dit-on, posée après le Déluge.
Ararath, selon la plus ancienne tradition, exprime, après un cycle où le germe de l’humain n’avait pas pu se développer, le début d’un nouveau cycle où l’Intemporel allait se trouver en contact avec deux mondes dans l’homme : l’extérieur et l’intérieur.
Le thème que propose le schème Ararath est le suivant : ces deux mondes, au départ, sont figés l’un en face de l’autre, car la matière dont sont faits les corps humains est élaborée au début par l’élément femelle le plus primitif.
En effet, la conscience de Noahh (Noé) chavire et est absorbée par le vin que produit la terre femelle. La maturation du germe est transmise à Schem, c’est-à-dire, virtuellement, au nom. Schem, en hébreu, veut dire le nom et Schem est aussi l’ancêtre éponyme des Sémites.
Je passe sur les dix générations symboliques de Schem (il y en a dix symboliques de Scheth à Noahh) pour arriver au vieux Terahh, père d’Abram. La merveilleuse histoire de ce père, de ses trois fils et de la sortie de Aur-Kasdîm aura sa place plus loin. Pour l’instant, je n’en suis qu’à indiquer les traces de la Qâbala à travers des récits pseudohistoriques.
Aur-Kasdîm que l’on traduit « Ur-en-Chaldée » veut dire, d’après le texte : la lumière des magiciens. Aur, en hébreu, veut dire lumière, et les Kasdîms sont les devins, astrologues, magiciens dont l’influence était grande en Chaldée.
Les cabalistes ont toujours eu en horreur cette magie-là.
Abram est le début légendaire d’un nouveau cycle : celui où la religion commence à s’affranchir de la « lumière des magiciens » et s’oriente vers la lumière intérieure engendrée par la perception de YHWH, l’immanence. Et Abram a en mains un document merveilleux. C’est le testament d’une civilisation disparue, apporté dans l’arche.
Quelques survivants ont pu sauver, condensé en une série d’idéogrammes, tout ce que les hommes ont jamais pu savoir, tout ce qu’ils pourront jamais savoir au sujet de la vocation de l’homme face à l’impénétrable mystère du « il y a quelque chose ».
Ces survivants que Gen. vi,4 nomme « les fils d’Elohim » avaient depuis longtemps fait souche, ayant eu commerce avec les « filles d’Adâm » et avaient depuis longtemps disparu, mais non sans avoir légué leur connaissance de bouche à oreille et obtenu que leur précieux document fût confié, d’une génération à l’autre, à des mains sûres.
La tradition ésotérique veut qu’Abram ait été le premier à comprendre réellement le sens de leur message. Si, d’une part, la lumière artificielle de la magie devait s’éteindre au bénéfice d’une lumière intérieure, d’autre part l’humain en genèse devait être projeté dans le monde des grands conflits, de l’incertitude, des espoirs fous et de la désespérance, des ruptures d’équilibre, des joies et des catastrophes, car tout refuge est un arrêt de développement et ne donne naissance qu’à des êtres nés avant terme, condamnés à ne pas mûrir.
Tel est le sens de Canaân. C’est là où Abram alla planter ses tentes, après avoir quitté le pays de sa naissance.
La suite du récit biblique est un vaste poème épique où tous les thèmes du mythe se retrouvent en une commune aventure qui consiste, par le truchement d’Abraham et Sarah, d’Isaac et Rebecca, de Jacob, Léa et Rachel, à implanter le germe de l’humain-en-genèse dans la terre symbolique de Canaân, ou, sur un autre plan, de féconder la dualité en l’animant d’un mouvement organique trinitaire.
Ces récits ne sont que pseudo-historiques. Chaque personnage y joue le rôle assigné à ses fonctions dans le développement d’un drame qui, jusqu’à ce jour, ne semble pas avoir été compris. Mais l’exégèse de ces chapitres-là ne peut pas entrer dans le cadre de cet ouvrage.

