Litteratura

Accueil > Shruti - Smriti > Javary : Le Tétragramme

CAHIERS DE L’HERMÉTISME

Javary : Le Tétragramme

Geneviève Javary

dimanche 20 juillet 2014

Extraits du CAHIERS DE L’HERMÉTISME.

Certains des Noms de Dieu ne sont pas en relations arithmétiques avec le Tétragramme, mais ils se trouvaient déjà dans le texte de la Bible, associés ou non avec YHWH. Deux sont des mots simples Iah et El, deux sont dérivés de El : Elohim et Eloha. Adonai n’est qu’un nom commun sacralisé et signifie seigneur. On peut ajouter Sadai, Shadai et Sabbaoth, qui signifient la puissance du Dieu des armées. L’exégèse kabbalistique, qui ne se soucie pas des raisons probables pour l’emploi de ces noms divers, est d’une extrême richesse.

Le nom Iah, qui signifie Dieu, ne se trouve guère qu’en composition, en particulier dans les noms propres. Les kabbalistes l’ajoutent à Ben, fils en hébreu, pour former le mot Binah, Intelligence, la troisième des Sefirot, dont nous reparlerons.

Le mot El, de la même racine que Allah, est le mot sémitique pour signifier Dieu. Comme Iah, qui représente la première partie du Tétragramme vocalisée Yahve, Reuchlin relie El au Tétragramme, mais par une démonstration bien déroutante pour nos esprits :

"...El, Elohim, Eloha. Chacun d’eux tire son origine du Tétragramme ineffable, qui contient quatre lettres, voici le 4, qui désigne 26 [2], voici le 26, qui sont tous un seul symbole de Dieu, et voici le Un ; joignez chacun, le 4, le 26, et le 1, vous obtenez El [3]. Si vous ajoutez à ce nom la terminaison du Tétragramme WH vous aurez Eloha. Pour Elohim maintenant on dira que son Mem n’a pas de signification réelle, ce n’est qu’une inflexion grammaticale. (...) Si vous ajoutez au début du Tétragramme Iah El en ordre inversé, vous aurez Elohi, qu’on prononcera Elohim avec la flexion du Mem. Ce mot qui est écrit souvent avec les lettres du Nom ineffable a les voyelles d’Elohim. En Kabbale, on use souvent en effet de l’ordre inverse (Ibid., p. 264)."

Iah et El s’opposent ; Iah c’est Dieu dans sa clémence, El Dieu dans sa puissance et dans sa force : et Reuchlin compare l’appellation de Jupiter capitolin, très bon, très grand, à celle que la nation des juifs donne à son Dieu, qui a nom Iah pour ses bienfaits, et pour sa puissance et sa force El (Ibid., p. 237).

"Iah s’oppose aussi à Adonai, comme la clémence au monde de la sévère justice. Les kabbalistes s’appuient sur le Ps. CXXIX, 3 : Si tu gardes le souvenir des iniquités, ô Iah Seigneur, qui pourra subsister ? (Ibid., p. 237)."

On peut aussi combiner Iah ou El avec l’un des 72 noms et l’on obtient « un nom particulièrement remarquable avec l’accent sur la dernière syllabe » (Ibid.). Ces noms doivent être prononcés « avec crainte et tremblement par les hommes dévots et dédiés à Dieu » (Ibid., p. 238).

Mais l’opposition la plus fréquemment évoquée par les kabbalistes est celle Adonai/Elohim :

"Dieu ineffable avant la création, fut appelé pendant la création Elohim, et après la création habitant dans le monde comme dans son Temple Adonai (Ibid., p. 265)."

Dieu Tétragramme devient donc quand il crée Elohim, puis quand il règne sur le monde créé Adonai. Mais la relation entre le Tétragramme et Adonai est plus subtile encore, puisque Reuchlin continue :

"On lit ainsi Psaume 11 (XI, 4) : Tétragramme dans son saint Temple, Tétragramme qui a son trône dans les cieux, qui domine dans ses oeuvres. (...) Aussi en Kabbale le Temple est le symbole d’Adonai et réciproquement par égalité numérique. De même que l’ineffable Tétragramme doit être adoré dans Adonai comme dans son HYKL, temple, Dieu doit être aimé en Dieu selon le triple monde, en Jérémie (VII, 4) : Temple du Seigneur, Temple du Seigneur, Temple du Seigneur (Ibid., p. 265)."

Mais d’autres combinaisons restent possibles, toujours riches d’enseignement, entre ces trois noms principaux de Dieu. Si durant la création Dieu est bien Elohim seul, après la création, c’est « Elohim Tétragramme, Roi des rois, Seigneur des seigneurs » qui « fait son entrée. (...) Ici le Tétragramme retentit ouvertement aux oreilles de toutes créatures pour la première fois, pour que nous comprenions la Clémence de Dieu avec sa justice » (Ibid., p. 262). Si le Tétragramme est placé avant Adonai « nous comprenons que la puissance du Tétragramme descend jusqu’au mot Adonai proféré » (Ibid.). Dans l’ordre inverse, Adonai Tétragramme, « nous concevons alors par la Mens que les numérations, c’est-à-dire les propriétés divines montant de bas en haut, appréhendent la lumière (lux) suprême » (Ibid., p. 263). Parfois aussi c’est la propriété de jugement qui est suggérée en associant le Tétragramme à Sabbaoth, des armées.


[2En additionnant la valeur numérique des quatre lettres : 10 + 5 + 6 + 5 = 26.

[3En additionnant 4 + 26 + 1 =31 ou la valeur de L = 30 et de E (Aleph) = 1, donc 30 + 1 = 31.