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Mythes grecs et mystère chrétien
Hugo Rahner : LE MYSTÈRE DU BAPTÊME
Hugo Rahner
dimanche 15 août 2010
Hugo, Rahner, Mythes grecs et mystère chrétien.
CHAPITRE III LE MYSTÈRE DU BAPTÊME
Voici pour l’explication théorique de l’idée de « mystère du baptême ». Si nous présentons maintenant et par la suite quelques-uns des exemplaires les plus précieux provenant du trésor de ce mystère du Christianisme antique, le mystère du baptême se trouve toujours devant nous sous cette forme qu’il a adoptée tout au long de sa croissance organique et intérieurement vivante dans le cours des quatre premiers siècles : il reste dans toute sa richesse presque troublante toujours le simple signe de l’eau et de la parole (Ephésiens, 5, 26), qui puise sa force créatrice de vie dans la crucifixion du Christ. C’est là la représentation fondamentale dont sort tout le développement ; c’est pour ainsi dire l’âme qui rend possible pour l’esprit et les sens et les formes du Chrétien antique l’utilisation en vue de la formation de son mystère baptismal du mystère cosmique et biblique de la croix, et même des pensées et des paroles humainement les plus profondes et les plus pures qui proviennent des mystères. Principalement : que ce soit en fait à partir du rite simple de baptême du Nouveau Testament que la plénitude du mystère de l’antiquité chrétienne se soit formée, cela même se justifie par la nature de l’institution sacramentelle du salut — par le fait qu’un acte si misérablement pauvre, usant d’eau et de mots, puisse être réglé par le Christ et avoir une efficacité si inouïe. Ici intervient le sentiment que possède l’homme antique pour le mystère, pour cette tension, donnée essentiellement avec un symbole, entre ce qui est dit et ce qui est pensé, entre la simplicité du visible et la force de l’invisible. Tertullien a merveilleusement traduit ce sentiment dans son livre du baptême, lorsqu’il oppose l’une à l’autre les deux polarités : « simplicitas divinorum operum quae in actu videtur et magnificentia quae in eifectu promittitur ». Voilà, « simple mais grand », une description marquée de l’empreinte tertullienne. Et si ainsi dans le cours de quatre siècles l’Église entoura la nature simple du baptême d’un riche rituel de mystère, tout cela n’est que la tentative visant à rendre humainement visible ce qui est déjà signifié et opéré de grandeur sublime et divine par le signe simple des temps primitifs. Grégoire de Nysse exprime le même sentiment de mystères lorsqu’il dit en parlant du baptême qu’il est « une faible essence mais cependant la base primitive de grandes richesses ». Le baptistère est, ainsi que le dit la prière de la liturgie baptismale gallicane « un lieu modeste, mais rempli de la grâce » et saint Ambroise a formulé, dans une poésie sur l’Église baptismale qui va nous occuper encore immédiatement ci-après, une phrase, que l’on pourrait écrire au sujet de tout le mystère antique du baptême — c’est l’étonnement qui se crée au sujet de l’opposition paradoxale entre « le point minuscule » du visible et l’efficacité divine invisible qui en provient :
« Nam quid divinius isto ut puncto exiguo culpa cadat populi ? »
Aussi vais-je présenter ici quelques aspects du mystère baptismal du Christianisme primitif qui nous donneront une idée de la façon dont le mystère de la croix se répercute dans le mystère du baptême et de la façon dont chez le Chrétien antique toutes richesses concourent à former son propre mystère primitif.

