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René Alleau : ÉNIGMES ET SYMBOLES DU MONT SAINT-MICHEL

jeudi 10 juillet 2014

Extraits de l’introduction du livre de René Alleau : ÉNIGMES ET SYMBOLES DU MONT SAINT-MICHEL

LES ORIGINES DE LA VIE MONASTIQUE.

La vie monastique, en effet, a pris son origine dans la vie érémitique orientale, le long des déserts de l’Egypte et sur les rives de la mer Morte et du Jourdain. Les ermites vivaient isolés, en des grottes ou en des cabanes faites de branches d’arbres ou de pierres sèches. D’autres ascètes rapprochèrent leurs cellules pour se prêter assistance et, principalement, afin de se réunir dans la pratique des. exercices religieux. Leur « habitation commune » fut l’origine du Caenobium monastique.

Les solitaires de l’Orient, guidés par saint Antoine, saint Hilarion, saint Pacôme, répandus dans toutes les provinces de l’Empire, acceptèrent, à la fin du ive siècle, la règle écrite par saint Basile ; elle devint la base du Caenobium, lorsque s’établirent les monastères de l’Eglise grecque ; elle y est encore observée.

Les religieux occidentaux, sous l’influence ou sous la conduite de saint Athanase, saint Ambroise, saint Honorât, saint Martin, saint Hilaire, furent réunis d’abord par les règles de saint Colomban et de saint Ferréol. Ceux qui préférèrent la vie érémitique à la vie communautaire eurent plus tard la discipline de Grimmlaïc. Au VIe siècle, saint Benoît établit sa règle en Italie et elle se répandit rapidement dans tout l’Occident où elle fut pratiquée, presque seule, pendant plusieurs siècles.

Au milieu du VIIIe siècle, lorsque l’empereur Léon l’Isaurien promulgua ses édits contre les images, sous le prétexte qu’elles détournaient de leur voie véritable les hommages dus au Créateur, l’Occident profita des nombreuses émigrations d’artistes grecs chassés par les Iconoclastes et s’enrichit de leur pratique et de leurs techniques savantes. Vers le même temps, l’évêque de Metz, Chrodegand, fondait les monastères des clercs. Dès cette époque, les collégiales, puis des chapitres réguliers, s’élevèrent auprès des cathédrales.

Les moines qui s’étaient établis en Afrique, en Asie et en Europe, empruntèrent certaines formes architecturales aux civilisations antiques et ils adaptèrent même à leur usage plus d’un monument païen de l’Egypte et de la Nubie, de la Grèce, de Rome et de la Gaule. Certains ermites se retirèrent en ces lieux sacrés. Par exemple, le roi Childebert honora de sa visite saint Euricius qui vivait près d’un ancien dolmen, au-delà de la Loire.

Les Normands et les Sarrazins interrompirent l’activité créatrice et organisatrice des moines carolingiens en renouvelant, sous les règnes des successeurs de Charlemagne, les maux qu’apportèrent, dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, les invasions barbares. Contre les calamités publiques, la vie des cloîtres offrait une protection nécessaire aux individus en même temps que s’y conservait le dépôt des traditions religieuses et savantes de l’Antiquité. Lorsque la paix fut rétablie en Europe, les moines-constructeurs conçurent des plans plus vastes et bâtirent des édifices plus durables qu’auparavant. On remplaça le bois par la pierre et l’on garantit la durée des monuments et des fondations par des fortifications capables de résister à de longs sièges et à de nombreux assauts. Les célèbres abbayes romanes et cisterciennes datent de ce temps de renouvellement de l’architecture monastique.

Au Mont, les Bénédictins eurent pour premier abbé, entre 966 et 991, Mainard, lequel, auparavant, entre 960 et 966, avait dirigé la reconstruction du monastère de Saint-Wandrille, ruiné par les guerres. Ainsi commença l’observance, en ce lieu, de la règle de saint Benoît.

Les religieux donnèrent le titre d’ « abbé », c’est-à-dire de « père », aux supérieurs des monastères, élus par eux : de là est venu le mol d’ « abbaye » pour désigner les maisons religieuses les plus considérables tant par leur étendue et leurs richesses, que par leurs prééminences et leurs privilèges qui les distinguent des autres monastères. Quand une abbaye envoyait une colonie monastique fonder une autre maison, celle-ci prenait le nom de « fille » de la précédente. Parfois, ces « filles » devenaient bien plus importantes que l’ « abbaye-mère » FOOTNOTE()Le vocabulaire maçonnique a gardé ce souvenir lointain dans l’expression de « Loge-Mère », notamment en Allemagne : Grosse National Mutterloge in der preussischen Staaten, genannt zu den drei Weltkugeln, par exemple.FOOTNOTE. Ainsi Cluny, chef d’ordre, était-elle « fille » de Grigny, qui descendit au rang de prieuré. Cette relation de dépendance était surtout reconnue dans, l’ordre cistercien.