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Le Royaume Inconnu
Wion : URBAIN II LE PERE DES CROISADES
Frida Wion
samedi 2 août 2014
Extrait de « Le Royaume Inconnu ».
Nécessité de revenir sur l’histoire des Croisades pour expliquer l’apparition du Prêtre-Jean. - un orateur qui surgit fort a propos. - L’empereur de Byzance et les croisés.
La rupture entre les deux Eglises qu’Urbain II tenait tant à réunir, avait surtout été causée par l’ambition démesurée du Patriarche de Byzance, Michel Céroularios, qui n’admettait pas voir Rome rétablir son emprise sur les diocèses de l’Italie du Sud et de ce fait précipiter la défaite de l’empire byzantin, sa colère s’était manifestée par des propos tels, que le Légat du Pape Léon IX dut l’excommunier le 15 juillet 1054 dans la basilique de Sainte Sophie, ruinant à tout jamais l’espoir de voir les Patriarches grecs devenir Chefs de l’Eglise universelle.
Rapidement aux yeux des Latins, les Grecs ne furent plus que des schismatiques, auxquels on ne devait ni égards, ni tolérance, ce à quoi les Byzantins ripostèrent par la haine et la rancune !
Cet état d’esprit n’empêchait nullement les relations diplomatiques entre les deux sœurs ennemies de se poursuivre. L’empereur de Byzance était au courant des préparatifs qui se faisaient en Europe pour protéger les pèlerins, il pensa que le moment était venu de demander au Pape d’envoyer des hommes pour lutter contre les Turcs qui menaçaient à ses frontières ; les mercenaires qu’il employait ordinairement n’étaient pas assez nombreux et lui coûtaient fort cher. Les ambassadeurs envoyés auprès du Pape ne se firent pas faute de décrire la situation sous les plus noirs présages, mais si le Pape comprenait parfaitement le danger de la situation, c’est-à-dire l’islamisation probable de la Grèce, il lui était difficile de distraire des hommes résolus à conquérir le Tombeau du Christ, pour les envoyer consolider le trône d’un schismatique. Pierre l’Ermite fut envoyé en Allemagne et eut le même succès qu’en France, puisque le chemin des Lieux saints passait par Byzance, quelques-uns de ces pieux soldats resteraient sur place.
Alexis Commène en demandant l’aide militaire, avait pensé recevoir des hommes qu’il aurait pu manœuvrer à sa guise. Il vit avec étonnement venir vers lui des masses innombrables d’hommes étranges, peu civilisés, peu cultivés, indisciplinés et insolents, mais débordant d’une singulière ardeur religieuse.
L’Empereur et sa fille Anne, tous deux esprits cultivés et raffinés, s’occupant d’art, de théologie, tenant à la pompe traditionnelle et à l’étiquette de la cour, furent stupéfaits et prirent peur. Au lieu de voir leur armée se renforcer par des militaires de carrière, ils avaient devant eux une horde qui refusait toute obéissance, et qui se conduisait plus comme des Barbares que suivant l’idée qu’ils s’étaient faite de la civilisation européenne.
Avec de tels représentants, l’espoir qu’avait le Pape de rétablir les liens entre les deux Eglises, devenait de jour en jour plus insensé, et d’autant plus irréalisable que les Croisés s’étaient emparés du Patriarche grec et que pour couronner ce haut-fait, ils avaient mis un homme à leur solde sur le trône. C’était, il faut l’avouer, un manque de tact, et inévitablement, cette façon de procéder eut pour résultat de dresser tout le peuple contre l’envahisseur, d’en faire « des résistants » avec tout ce que cela comporte de rouerie, de lâcheté, de mensonge envers l’ennemi. Seuls, les Arméniens, dont l’esprit chrétien était encore entaché de paganisme, et qui, de plus étaient habitués à être martyrisés par les Turcs, les Grecs et les Byzantins, trouvèrent, grâce aux Francs un changement dans leur manière de vivre, et, heureux et reconnaissants, ils furent pour eux de fidèles alliés.
Ainsi, Alexis empereur de Byzance, pour avoir appelé à son aide les troupes étrangères, se voyait obligé de subir l’indiscipline et la charge d’entretenir des pèlerins rapaces et pieux, autant que les projets ambitieux de leur chef. Les Turcs ayant perdu l’espoir de s’enrichir sur les dépouilles de Byzance et de Constantinople, s’étaient retirés sur des terres bien moins gardées. L’ordre ne fut rétabli qu’à l’arrivée du roi de France Louis VII. En même temps, Godefroy de Bouillon, chef plus sage que les autres et qui n’oubliait pas le véritable but des Croisades, rassembla ses troupes et passa le Bosphore.

