Litteratura

Accueil > Shruti - Smriti > Ruysbroeck : L’âme et le corps

Œuvres de Ruysbroeck

Ruysbroeck : L’âme et le corps

Trad. de l’Abbaye de Saint Paul de Wisques.

dimanche 7 décembre 2008

 LE LIVRE DU TABERNACLE SPIRITUEL

De plus chaque ais a une mesure et demie de largeur. Par là nous apprenons que chaque détermination libre ressemble à cela, en ce sens que le libre arbitre embrasse l’âme et le corps comme une mesure entière et une demi-mesure, pour servir Dieu par leur intermédiaire. L’âme est la mesure entière, car elle possède une activité parfaite en elle-même, qui consiste dans l’amour et dans la connaissance. Néanmoins elle a besoin de la demi-mesure, car si elle n’était pas unie au corps, elle ne pourrait pas mériter. Pourtant le corps n’est qu’une demi-mesure, car aucune activité corporelle, sans l’opération de l’esprit, ne peut atteindre Dieu, ni mériter la béatitude, et c’est pourquoi l’âme et le corps constituent un seul homme, pour que la nature corporelle de l’homme avec toutes ses activités puisse recevoir noblesse, liberté et immortalité, par la noblesse, liberté et immortalité de la nature spirituelle, avec laquelle elle est une seule personne et un seul homme. Voilà comme chaque ais, qui représente la détermination libre, doit avoir une mesure et demie de largeur, sans quoi il ne s’adapterait pas au tabernacle. CHAPITRE XV

Dans cet article l’on peut comparer le Christ au précieux saphir, qui est de deux sortes. La première a une couleur jaune aux reflets de pourpre et paraît comme mêlée de poudre d’or. La seconde est bleu ciel et, exposée aux rayons du soleil, elle émet une lumière brûlante, mais le regard ne peut la traverser. C’est tout cela que nous apercevons dans Notre-Seigneur, en ce cinquième article. Car, lorsque sa sainte âme descendait aux enfers, son corps gisait dans le sépulcre, tout jauni par la privation de l’âme, dans la pourpre de ses blessures sanglantes, mais aussi dans la poussière d’or de la divinité qui lui demeurait unie. Et dans sa descente aux enfers son âme avait la clarté du bleu ciel, afin de réjouir tous ses amis et les remplir de bonheur par sa lumière. Dans sa résurrection d’entre les morts, la clarté devient si grande et si puissante en l’âme et le corps, sous l’illumination du soleil de la divinité, qu’il émet des rayons lumineux et brûlants, enflammant ainsi l’amour de quiconque approche de lui. CHAPITRE XLV

Voyez, ce double appétit de Dieu et de toutes les vertus pénètre l’âme et le corps, et il est naturel et surnaturel. Il est représenté par les reins intérieurs de la victime, que Dieu ordonne de brûler entièrement dans le feu de son amour, ainsi que les rognons, figure des sens et des puissances sensibles avec leurs œuvres, qui doivent toujours adhérer à l’esprit et à ses œuvres. La graisse intérieure qui recouvre les reins, c’est la consolation et la joie, avec le goût abondant de douceur spirituelle, que l’homme ressent et qui le rendent tout brûlant de désir. Lors donc que le Christ touche ce désir ardent et l’attise de sa grâce, la chaleur d’amour devient si grande qu’elle dévore et consume tout ce qui auparavant était aimé et désiré distinctement ; et l’homme devient si simple en amour qu’il ne sait et ne peut que porter et ressentir l’amour. CHAPITRE LXXXVIII