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Origène

La théologie sacramentaire d’Origène (I)

Jean Daniélou

segunda-feira 17 de junho de 2013

Origène : Par Jean Daniélou

Extrait du "CHAPITRE III - LA THÉOLOGIE SACRAMENTAIRE D’ORIGÈNE"

Origène s’adresse fréquemment dans ses Homélies aux catéchumènes qui faisaient partie de son auditoire. Il insiste beaucoup sur la nécessité de la conversion morale qui doit précéder le baptême : « Vous qui désirez recevoir le saint baptême, d’abord vous devez être purifié par la foi, vous devez d’abord, par l’audition du Verbe de Dieu, enlever les racines des vices et apaiser vos habitudes barbares pour que, ayant revêtu l’humilité et la douceur, vous puissiez recevoir la grâce du Saint-Esprit » (Hom. Lev., VI, 2) ou encore : « Venez, catéchumènes, faites pénitence pour recevoir par le baptême la rémission des péchés » (Hom. Luc, XXI). Origène insistera toujours sur l’importance des dispositions dans la réception des sacrements. Il va même jusqu’à écrire : « Si quelqu’un vient au baptême peccans, il n’obtient pas la rémission des péchés » (ici.). Et partant du symbolisme du baptême, il écrit : « Il faut d’abord que tu meures au péché, pour pouvoir être enseveli avec le Christ » (Comm. Joan., V. 8).

Mais tout en insistant sur l’importance des dispositions, Origène enseigne l’efficacité du sacrement en lui-même. Dans un texte remarquable il le compare aux guérisons miraculeuses du Christ : « Il faut savoir que, de même que les dynameis étonnantes dans les guérisons opérées par le Sauveur, symboles de ceux qui, de tous temps, sont purifiés par le Logos   de toute maladie et de toute souillure, furent néanmoins efficaces, dans leur réalité corporelle, en appelant à la foi ceux qui avaient reçu la grâce, de même aussi le bain de purification par l’eau, symbole de la purification de l’âme lavée de toute souillure et de toute malice, est non moins que la vertu des invocations à la Trinité adorée, pour celui qui s’offre à la divinité, principe et source des grâces divines » (Comm. Joh., VI, 17; IV, 142). Le parallélisme établi ici entre l’humanité du Christ et le rite visible comme instrument de la grâce invisible est tout à fait remarquable et situe bien le sacramentalisme dans son vrai plan.

Mais le rôle du catéchète n’est pas seulement de préparer les cœurs, mais aussi d’instruire les intelligences. Aussi, Origène précise-t-il la nature de la « grâce » baptismale. Elle est un mystère de mort et de résurrection avec le Christ : « Ceux qui sont baptisés sont baptisés dans la mort du Christ et sont ensevelis avec lui par le baptême dans la mort » (Comm. Rom., VIII, 5). Origène retrouve ce mystère dans l’Exode : « Souviens-toi de ce qui a été lu plus haut, lorsque Moïse disait au Pharaon : Nous ferons un voyage de trois jours dans le désert et nous immolerons au Seigneur notre Dieu. C’était le triduum vers lequel se hâtait Moïse et à quoi s’opposait Pharaon. Il ne permettait pas aux fils d’Israël de parvenir au lieu des miracles, il ne leur permettait pas de s’avancer, en sorte de pouvoir jouir des mystères du troisième jour. Ecoute, en effet, le prophète qui dit : Le Seigneur nous ressuscitera après deux jours et le troisième nous ressusciterons et nous vivrons sous son regard (Osée, VI, 3). Le premier jour est pour nous la Passion du Seigneur, le second, celui où il est descendu aux Enfers, le troisième, le jour de la résurrection. Et ainsi, le troisième jour, Dieu les précédait, pendant le jour dans une colonne de nuée, pendant la nuit dans une colonne de feu. Que si, selon ce que nous avons dit plus haut, dans ces paroles, l’Apôtre nous fait voir à juste titre le sacrement de baptême, il est nécessaire que ceux qui sont baptisés dans le Christ, soient baptisés dans sa mort, qu’ils soient ensevelis avec Lui et qu’avec Lui ils ressuscitent des morts le troisième jour, selon le mot de l’Apôtre : Il nous a ressuscites avec Lui et nous a fait asseoir avec Lui dans le ciel. Lorsque donc tu recevras le mystère du troisième jour, le Seigneur commencera de te conduire et de te montrer lui-même la voie du salut» (Hom. Ex.,V, 2; Baehrens, 186). Nous avons, dans ce texte, la fusion de deux interprétations pauliniennes du baptême : d’une part, allusion à 1Cor., X, 2 : le baptême dans la nuée et dans la mer; et de l’autre, à Rom., VI, 3, le baptême comme mort et résurrection avec le Christ.