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De l’incarnation de Jésus-Christ
Boehme : De la vierge Marie et de l’incarnation de Jésus-Christ, fils de Dieu.
Jacob Boehme
vendredi 1er août 2014
5. Et il est reconnaissais que, tant Marie sa mère, que Christ de sa mère, tous deux ont été d’essence humaine, en corps, âme et esprit, et que Christ a reçu une âme de l’essence de Marie, mais sans semence d’homme. Le grand mystère de Dieu fut là manifesté ; le premier homme dans sa profondeur, celui qui mourut, ressuscita ici, entendez dans le principe divin ; car la divinité se mut à cette fin et alluma le feu dans le principe du Père ; ainsi, le sulphur mort en Adam, ressuscita ; car le Verbe était revêtu de la substantialité céleste et se manifesta en céleste substantialité dans l’image virginale de la divinité. C’est là la pure, chaste vierge dans laquelle le Verbe de la vie devint homme, et ainsi, la Marie extérieure fut ornée de la céleste, hautement bénie vierge, et bénie entre toutes les femmes de ce monde : en elle fut revivifiée la partie morte et prisonnière de l’humanité ; ainsi, elle fut élevée en gloire comme le premier homme avant la chute ; elle fut la mère du prince royal. Ce ne fui pas le fait de son pouvoir, mais du pouvoir divin ; si le centre divin ne s’était pas mu en elle, elle n’eût pas été autre que toutes les filles d’Eve ; mais le Verbe de la vie avait arrêté le but ici, par l’alliance de la promesse ; c’est pourquoi elle est bénie entre toutes les femmes et pardessus tous les enfants d’Eve. Non qu’elle soit une déesse qu’on doive honorer à la place de Dieu, car elle n’est pas le but, - et elle le dit aussi : « Comment cela arrivera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? » - Mais le Verbe de la vie, dans le centre du Père, qui, par la motion de la divinité se donna à l’humanité et se manifesta en essence humaine, est le but : c’est la fin (pie nous devons ardemment poursuivre par la nouvelle naissance.
6. C’est là une plus grande merveille que celle de la création du premier Adam ; car celui-ci fut créé de trois principes et son esprit lui fut introduit par l’esprit divin ; le cour de Dieu ne dut pas se mouvoir à l’extraordinaire, son esprit seul se mut, de son cour : ici, se mut le centre ou le cour de Dieu, qui était demeuré en repos dés l’éternité ; le feu divin fut allumé ou si l’on veut réveillé.
La chère porte :
7. Saisissons donc bien l’incarnation de Christ, le Fils de Dieu : Il n’est pas devenu homme dans la vierge Marie seulement, comme si sa divinité ou son être divin eussent été là enfermés ou livrés. Non, ô homme, il en est tout autrement, ne te laisse point égarer par la raison, nous connaissons ce qui en est. Aussi peu que Dieu est circonscrit en un lieu, tandis (qu’il remplit tout, aussi peu s’est-il mu dans une parcelle seulement, car il n’est pas divisible, mais entier partout : là où il se manifeste, il est entièrement en évidence. Il n’est pas non plus mensurable : il n’a ni lieu ni place ; donc, il se fit une place dans une créature et par conséquent, il reste entier à côté et hors de la créature.
8. Lorsque le Verbe se mut pour la manifestation de la vie, il se manifesta dans la substantialité divine soit dans l’eau de l’éternelle vie ; il y entra et devint sulphur, c’est-à-dire chair et sang ; il fit la céleste teinture qui environne et remplit la divinité, dans laquelle la sagesse divine demeure éternellement, avec la magie divine. Entends bien : la divinité a désiré de devenir chair et sang, et bien que la pure et claire divinité demeure esprit, encore est-elle devenue l’esprit et la vie de la chair et opère-t-elle dans la chair ; en sorte que lorsque nous portons notre imagination en Dieu et nous abandonnons entièrement à lui, nous pouvons dire « que nous entrons dans la chair et le » sang divins, que nous vivons en Dieu, » car le Verbe est devenu homme et Dieu est le Verbe.
9. Nous n’élevons pas toutefois la créature de Christ comme s’il n’en eût pas été une. Prenant pour comparaison le soleil et sa lumière nous vous dirons : nous comparons le soleil à la créature de Christ et le soleil est bien un corps ; puis, d’autre part, toute la profondeur de ce monde au Verbe éternel dans le Père. Nous voyons bien que le soleil luit dans toute la profondeur et lui donne chaleur et force ; mais nous ne pouvons pas dire que dans la profondeur, la force et l’éclat du soleil n’existent pas (ne s’y trouvent pas), indépendamment du corps du soleil. Si cette force et cet éclat no s’y trouvaient pas, la profondeur ne saisirait pas non plus la force et l’éclat du soleil, car une force, un éclat seulement saisit l’autre. La profondeur et son éclat sont cachés. Si Dieu le voulait, toute la profondeur serait un pur soleil ; il ne s’agirait que de l’allumer pour engloutir l’eau et la convertir en esprit, l’éclat du soleil se répandrait alors partout ; mais il faudrait pour cela que le centre du feu s’allumât, comme dans le lieu du soleil.

