Accueil > Shruti - Smriti > Boehme : De la pure virginité
De l’incarnation de Jésus-Christ
Boehme : De la pure virginité
Jacob Boehme
mardi 26 août 2014
Extrait de « De l’incarnation de Jésus-Christ ».
CHAPITRE XII. De la pure virginité ; comment nous, pauvres enfants d’Eve, nous devons, de la pure et virginale chasteté, être conçus dans l’incarnation de Christ et naître de nouveau en Dieu, autrement nous ne verrons pas Dieu.
13. Puis donc que le Verbe de l’éternelle vie s’est de nouveau mu dans notre froid amour et dans notre virginité renfermée dans la mort, et a pris à lui notre virginité altérée, en devenant un homme selon l’intérieur et l’extérieur, et qu’il a introduit le centre ou notre feu d’âme dans son amour, nous reconnaissons son amour et sa virginité introduits en nous pour notre propre virginité ; car son amour et sa virginité se sont mariés et donnés à notre froid amour, à notre virginité, afin que Dieu et l’homme fassent éternellement une seule personne.
14. La raison dit ici : Cela s’est effectué en Marie soit dans une seule personne, mais moi, où demeure-je ? Christ n’est pas né aussi en moi.
15. Hélas ! ici se dévoile notre grande misère et aveuglement, nous ne voulons pas comprendre. Combien la passion matérielle nous a aveuglés et le démon séduits par et avec l’abominable antechrist en Babel, au point que nous ne voulions faire aucun usage de notre entendement ! Vois pourtant, misérable et déplorable raison ce que tu es ! Rien autre qu’une prostituée devant Dieu. Comment te nommerai-je autrement , puisqu’enfin tu es violatrice et parjure devant Dieu à la pure virginité ? N’as-tu pas la chair, l’âme et l’esprit d’Adam, n’es-tu pas provenue de lui ? N’es-tu pas issue de l’eau et du feu d’Adam ? Tu es bien son enfant. Fais ce que tu voudras, il faut que tu te tiennes coie ; tu nages dans le mystère d’Adam, soit dans la vie soit dans la mort.
16. Le Verbe divin (la virginité renfermée en Adam dans la mort) est bien devenu homme : le cour de Dieu s’est mu dans la virginité d’Adam, et de la mort, au travers du feu divin, l’a introduite, dans la source divine ; Christ est devenu Adam ; non l’Adam divisé, mais l’Adam virginal, tel qu’il était avant, son sommeil. Il a conduit l’Adam corrompu dans la mort, dans le feu divin, et a retiré de la mort l’Adam pur, virginal, par le feu. Tu es son fils, en tant que tu ne demeures pas étendu dans la mort comme un bois pourri qui ne peut inqualifier, qui dans le feu ne donne aucune essence, mais se réduit en cendre terreuse.
17. La raison dit encore : Comment se fait-il donc, puisque je suis un membre de Christ et l’enfant de Dieu, que je ne le sente ni ne l’aperçoive ? Réponse, oui, ici est le noeud, mon cher petit tronc souillé, fouille en ton sein, qu’appètes-tu ? la passion du diable, savoir : la volupté temporelle, l’avarice, les honneurs et la puissance. Écoute : c’est là le vêlement du diable ; dépouille-le et le jette ; place ton désir dans la vie de Christ, dans son esprit, sa chair et son sang ; porte ton imagination là-dedans, comme tu l’as portée dans la passion terrestre ; alors tu revêtiras Christ dans ton corps, ta chair et ton sang ; tu deviendras Christ ; son incarnation se mouvra aussitôt en toi, tu renaîtras en Christ.
18. Car la divinité ou le Verbe qui se mut en Marie et devint homme, le devint en même temps aussi dans tous les hommes morts dès Adam qui avaient remis et abandonné leur esprit à Dieu ou au Messie promis. Ce Verbe reposa aussi sur tous ceux qui devaient encore naître de l’Adam corrompu et se laisseraient seulement réveiller par lui ; car le premier homme comprend aussi le dernier. Adam est le tronc, nous tous sommes ses branches : Christ est devenu notre suc, notre force, notre vie. Si, maintenant, une branche sèche à l’arbre, qu’y peut la sève et la force de l’arbre ? La force se distribuant à toutes les branches, pourquoi la branche n’attire-t-elle pas à soi la sève et la force ? C’est la faute de l’homme s’il attire en lui le pouvoir et l’essence diaboliques au lieu de l’essence divine, et se laisse entraîner par le démon au désir et à la passion terrestres. Car Satan connaît la branche qui lui a poussé et pousse encore dans son ci-devant royaume. Puis, comme il a été un menteur et un meurtrier dès le commencement, il l’est encore, et infecte les hommes, parce qu’il sait que, par le régime extérieur des astres, ils sont tombés dans son attrait magique. 11 est donc un empoisonneur constant de la complexion et où il flaire une étincelle qui lui sert, il la présente sans cesse à l’homme ; si celui-ci y porte son imagination, il l’infecte aussitôt.

